L'écliptique, deuxième roman de Benjamin Wood, plutôt une bonne réussite !
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Le premier roman de Benjamin Wood (« Le complexe d’Eden Bellwether ») m'avait beaucoup plu.
Le premier roman de Benjamin Wood (« Le complexe d’Eden Bellwether ») m'avait beaucoup plu.
J'avais donc eu tout de suite envie de découvrir son
nouveau livre. « L’écliptique » fait quasiment 500 pages mais
on entre tout de suite dans l'histoire, et je trouve que le style de l'auteur
(j'ignore si c'est le même traducteur que pour le premier roman) se retrouve
rapidement. On est happé par l'intrigue sans trop savoir pourquoi, et j'avais
déjà connu ce sentiment lors de la lecture du "Complexe...". Le
livre est divisé en trois parties. La première partie se déroule dans les
années 70 sur une petite île proche d'Istanbul qui accueille un refuge, une
sorte d'hospice pour artistes en manque d'inspiration. Nous suivons l'histoire
de Knell, une peintre d'origine écossaise, qui y vit depuis 10 ans. Celle-ci
s'est liée d'amitié au fil des années avec 3 autres artistes qui se trouvent,
comme elle, dans une situation de blocage pour élaborer leur prochaine œuvre. Le
livre démarre au moment où un jeune garçon, Fullerton, est accueilli au sein du
refuge. Celui-ci est particulièrement tourmenté, et le doyen, absent au moment
de son arrivée, demande à Knell et à ses trois amis, de prendre soin de lui
pendant quelques jours et de veiller à ce qu'il s'accommode rapidement. Nous
remontons ensuite dans le temps et suivons Knell à ses débuts, lorsqu'elle a
découvert ses talents de peintre, lorsqu'elle a commencé à connaître le succès
et lorsqu'elle subit à sa manière l'angoisse de la page blanche (de la toile
blanche en l'occurrence). Dans la troisième partie, nous retrouvons le
refuge pour une conclusion en beauté.
Nous retrouvons dans ce nouveau roman, les idées
qui sous-tendaient déjà le "Complexe d'Eden Bellwether", à savoir la
mince frontière qui existe entre le génie artistique et la folie, ce qui fait
qu'un artiste doit s'abandonner, se perdre lui-même pour créer une œuvre. A
travers Knell, nous suivons le processus créatif nécessaire à la production de
toute œuvre artistique, l'enthousiasme des débuts, l'angoisse des secondes œuvres
(auront-elles le même niveau / le même succès que les premières ?). C'est
particulièrement intéressant de la suivre dans la préparation de ses nouvelles
expositions lorsqu'elle s'évertue à utiliser le même procédé artistique pour
produire de nouvelles œuvres (qui rencontrent le succès escompté) alors
qu'elle-même considère qu'elles sont d'un niveau bien inférieur à ce qu'elle a
produit dans le passé. Lorsque j'en étais au premier tiers du livre,
j'ai commencé à me demander où nous allions, je n'étais pas sûre de parvenir au
bout. Et j'ai regardé les critiques du livre sur le site de Babelio ainsi que
l'interview que Benjamin Wood a donné. Il dit quelque chose qui m'a frappé, il
explique qu'il faut donner du temps à l'histoire, aux personnages. C'est ce que
j'ai fait et je n'ai pas été déçue car ce livre aborde des sujets qui sont,
selon moi, vraiment intéressants.
D'abord ce livre fait écho à l'idée
qu'un vrai artiste est nécessairement quelqu'un d'un peu torturé, qui
s'abandonne complètement à son œuvre au détriment parfois de son bien-être
voire de sa propre vie. Cela me fait penser à des artistes comme Amy Winehouse,
Kurt Cobain, voire Verlaine ou Proust Knell s'interroge longuement sur la
qualité de ses œuvres, sur le fait qu'elle a peut-être déjà produit ses
meilleures créations. J'imagine que lorsque l'on rencontre un grand succès pour
un roman ou un album, il y a l'angoisse de se demander si l'on a encore quelque
chose à raconter. N'existe-t-il pas des auteurs d'une seule histoire ?
Probablement, et tous les artistes "long séjour" de Portmantle
s'interrogent là-dessus. Il y a également l'idée dans ce roman du
processus créatif devenu un peu industriel (lorsque Knell reproduit les mêmes
techniques pour produire le nombre d'œuvres auquel elle s'est engagée pour sa
nouvelle exposition). Cela me fait penser à ces auteurs de romans qui publient
tous les 6 mois / tous les ans un nouveau roman (Amélie Nothomb, Marc
Levy, Guillaume Musso, etc.). Est-ce que dans ces cas-là, la production
artistique n'est pas devenue industrielle, formatée ? Peut-on encore étonner
lorsque l'on produit autant d'œuvres pendant tant d'années ? Où cherche-t-on
encore l'inspiration ? N'a-t-on pas déjà tout dit ?
Pour
toutes ces raisons et toutes les réflexions qu'il a suscitées chez moi, je
recommande donc fortement ce roman !
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